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Note de l’auteur :

Cet article est avant tout une réflexion personnelle. Il ne prétend pas refléter l’opinion générale, mais uniquement mes sentiments et mon ressenti en tant que joueur lambda. Mon intention est simplement de partager mon point de vue sur l’évolution du marché du jeu vidéo et les émotions qu’elle suscite chez moi.

Je ne savais pas trop comment commencer à écrire ce texte, mais j’éprouve le besoin de m’exprimer sur mon ressenti face à l’évolution actuelle du marché du jeu vidéo. Que ce texte soit lu ou non, peu importe : je ne veux pas rester silencieux.

On peut voir une manette DS4 avec les jeux LEGO Jurassic World, Crash Team Racing: Nitro-Fueled ainsi que Lego Marvel Super HeroesDepuis quelques années, le marché du jeu vidéo évolue rapidement vers le tout dématérialisé. Jusqu’à récemment, cette transition ne m’inquiétait pas. Acheter des jeux sur des plateformes comme Steam ou d’autres boutiques numériques m’offrait une certaine sérénité : je savais que, même si la licence ne m’appartenait pas réellement, je pouvais accéder à mes jeux sans trop de soucis.

Cependant, les choses ont changé. Aujourd’hui, il semble que les stores, quelle que soit leur nature, disposent du pouvoir de retirer des œuvres de leurs catalogues, y compris celles que j’ai déjà payées. Ce sentiment d’insécurité est comparable à un parent qui retire un chocolat devant les yeux de son enfant, sans explication valable.

Prenons quelques exemples concrets :

  1. La suppression de jeux sur les stores
    Récemment, certains titres populaires comme DuckTales: Remastered ou Alan Wake ont été retirés des boutiques numériques en raison de problèmes de licences ou de droits musicaux. Ces cas montrent bien que même un achat ne garantit pas un accès à vie à un jeu. Voir plus d’information sur cet article au titre Alan Wake n’est plus disponible sur Steam, ou la stupidité des droits numériques en 2017
  2. Les inquiétudes liées aux abonnements et au streaming
    Avec l’essor des services d’abonnement tels que le Xbox Game Pass ou PlayStation Plus, les joueurs sont exposés à une autre forme d’incertitude : les jeux disponibles sur ces plateformes peuvent disparaître du jour au lendemain. Pour beaucoup, cela rend l’expérience de jeu plus volatile et moins durable.
  3. Les plateformes fermées
    Nous avons également vu des fermetures de plateformes, comme Google Stadia en 2023, où les utilisateurs ont perdu l’accès à leurs jeux achetés sans toujours obtenir de compensations suffisantes (source).

Que reste-t-il au joueur ?

Face à cette évolution, il devient de plus en plus difficile pour les joueurs de conserver un sentiment de propriété ou de sécurité. Certains, nostalgiques des jeux physiques, se tournent à nouveau vers les éditions physiques ou vers des plateformes ouvertes comme GOG.com, qui garantit des jeux sans DRM.

Cependant, la réalité est là : le marché privilégie la dématérialisation et les modèles d’abonnement, au détriment d’un achat durable.


Mais le physique, parlons-en ?

Prenons deux exemples récents qui illustrent bien les défis liés aux jeux physiques.

  1. Metaphor: Refantazio

J’ai précommandé ce jeu dès son annonce chez Leclerc, pensant naïvement que cette démarche me garantirait une copie à sa sortie. Mais non, le jour J, aucune trace du jeu en stock, malgré ma précommande. Déterminé, je me suis rendu en magasin, mais la situation était la même : aucune copie disponible.

Face à cela, seules trois options s’offraient à moi :

    • Me tourner vers le dématérialisé ;
    • Attendre une version d’occasion ;
    • Ou simplement patienter.

 

Finalement, nous avons choisi la patience, bien que cela ait été frustrant pour un titre que j’attendais impatiemment.

  1. Dragon Quest 3 HD-2D Remake


Pour ce jeu, nous avons opté pour une stratégie différente : attendre sa sortie en magasin et réserver une copie chez Micromania. Heureusement, j’ai eu la bonne idée de bloquer ma réservation, car au moment où je suis allé chercher le jeu, il n’en restait plus une seule copie disponible.

Mais là encore, une surprise m’attendait : ma copie avait été déblistée pour servir de vitrine dans les rayons et promouvoir le jeu. Bien que j’aie finalement pu repartir avec mon exemplaire, cette situation illustre bien les défis rencontrés par les joueurs souhaitant privilégier le format physique.

Le physique : des avantages perdus

Avec le format physique, nous perdons de plus en plus d’avantages qui faisaient autrefois partie intégrante de l’expérience d’achat. Voir l’article de THM en 2017 qui en parlait déjà à l’époque : https://www.thmmagazine.fr/2017/03/15/nintendo-switch-fin-des-notices-de-jeu-video/

Le plaisir d’avoir des notices, par exemple, a presque entièrement disparu depuis l’ère de la PlayStation 2. À l’époque, on trouvait dans les boîtes bien plus que le simple jeu :

  • Des cartes détaillées pour nos RPG favoris,
  • Des descriptifs approfondis du gameplay,
  • Le lore du jeu soigneusement présenté,
  • Et même des petits bonus comme des stickers ou des codes exclusifs, parfois inclus dans des éditions standard.

Aujourd’hui, bien qu’il reste encore quelques avantages liés aux précommandes, le plaisir de feuilleter une notice ou de découvrir des petits cadeaux sur le trajet du retour n’est plus qu’un souvenir nostalgique. Pour apporter plus de détails à mes dire (27 oct. 2024): https://www.rtbf.be/article/pourquoi-la-plupart-des-jeux-video-ne-sortent-plus-en-version-physique-11454156

Certes, on peut comprendre que, face aux coûts astronomiques des productions actuelles, ces éléments soient devenus plus rares et coûteux à produire. Mais cela soulève une question importante :

La course aux graphismes ne détruit-elle pas l’essence même du jeu ?

Aujourd’hui, les moteurs de jeu atteignent des niveaux de réalisme époustouflants, et certains graphismes rivalisent avec ceux des productions cinématographiques dignes d’un Spielberg. Des jeux comme The Last of Us Part II ou Red Dead Redemption 2 témoignent de cette quête incessante de perfection visuelle. Mais cette course à un prix également… Voir l’article de hakernoon qui en parle mieux que moi : https://hackernoon.com/lang/fr/combien-%C3%A7a-co%C3%BBte-de-d%C3%A9marrer-une-entreprise-de-jeux-vid%C3%A9o près de 100 millions de dollars pour un « AAA »

Cependant, En plus du prix… cette course au design pousse parfois à sacrifier d’autres éléments fondamentaux. Certains jeux privilégient tellement l’esthétique qu’ils en oublient le gameplay. Les temps de conception explosent, autant pour les développeurs que pour les graphistes, ce qui peut ralentir l’arrivée de nouveaux contenus et augmenter les coûts de production.

Cela soulève une question essentielle :

ne sommes-nous pas en train de perdre l’essence même du jeu vidéo ?

Image Mo5.com https://mag.mo5.com/51525/huit-jeux-homebrew-atari-7800-sur-une-seule-cartouche/

Pourtant, je suis moi-même partagé. D’un côté, je suis émerveillé par des univers fantastiques, sublimes et maîtrisés, où chaque détail visuel contribue à l’immersion. Mais d’un autre, je peux aussi bien m’amuser sur un jeu rétro, comme ceux de l’Atari, où l’imagination du joueur palliait les limitations techniques.

Peut-être que la solution réside dans un équilibre entre le visuel et l’essentiel : des graphismes qui servent le gameplay, et non l’inverse.

 

Alors, quelles solutions nous restent-il pour l’avenir ?

Face à l’évolution du marché, une des alternatives les plus prometteuses est de se tourner vers la scène indépendante. Les éditeurs comme Limited Run Games et d’autres initiatives similaires jouent un rôle crucial en contournant les tendances actuelles. Ces plateformes permettent aux amateurs de jeux physiques de s’offrir de véritables pépites indépendantes, souvent produites en édition limitée. Elles redonnent vie à un modèle qui privilégie l’objet tangible, offrant aux joueurs une connexion plus forte avec leur collection.

Mais cette solution, bien qu’appréciable, soulève une autre question :

Les consoles du futur seront-elles encore capables de lire des supports physiques ?

C’est là que l’inquiétude grandit. Avec chaque génération de consoles, les fonctionnalités physiques se réduisent. Prenons l’exemple de la PlayStation 5 et de la Xbox Series S|X :

  • La PS5 propose une version entièrement digitale, sans lecteur de disque.
  • La Xbox Series S est, elle aussi, exclusivement dédiée au dématérialisé.

Cette tendance pourrait signifier qu’à terme, le support physique disparaisse complètement des consoles grand public. Si cela devient la norme, qu’adviendra-t-il des joueurs qui préfèrent posséder leurs jeux, ou des collectionneurs qui apprécient les éditions spéciales avec leur contenu bonus ?

En regardant de plus près la sortie récente de la PlayStation 5 Pro, une problématique ressort : la difficulté à se procurer un lecteur Blu-ray. Est-ce dû à une production limitée de la part de Sony ? Je ne dirais pas que c’est intentionnel, mais leur stratégie semble indiquer le contraire…

Après la pénurie massive de PlayStation 5 lors de son lancement, on aurait pu s’attendre à ce que Sony anticipe mieux la demande, grâce à l’expérience déjà acquise lors du confinement de 2020 notamment pour les lecteurs Blu-ray de leur nouveau modèle. Pourtant, cela ne semble pas avoir été le cas. Était-ce un manque de prévision, ou une volonté tacite de pousser les joueurs vers des versions entièrement dématérialisées ?

Image Numerama.com https://www.numerama.com/tech/1806732-le-lecteur-de-disque-pour-ps5-pro-est-pris-dassaut-voici-ou-le-trouver.html

Et puis, il y a la question du prix de la console : comment Sony peut-il justifier un tarif aussi élevé dans le contexte économique actuel ? Entre l’inflation l’évolution des prix des jeux, la montée des coûts de production, et les attentes des joueurs, cette stratégie tarifaire paraît déconnectée des réalités du marché. Cela risque de renforcer les frustrations d’une partie de la communauté, déjà éprouvée par les limitations des stocks et les coûts croissants du gaming. Dans mon cas, cela a généré une telle frustration que j’ai décidé de ne pas l’acheter. Je refuse de cautionner une stratégie qui transforme la console en un produit à la carte, nécessitant l’achat de matériels supplémentaire gonflant le prix comme le socle, un lecteur Blu-ray ou encore une TV Sony, le tout à un tarif exponentiel.

Un futur incertain, mais des espoirs subsistent

Certains joueurs se tournent déjà vers des alternatives, comme l’achat de consoles rétro ou la préservation via des supports physiques d’anciennes générations. Par ailleurs, des entreprises comme Analogue développent des machines capables de lire d’anciens formats, permettant de continuer à jouer à des classiques sur cartouches ou disques.

Image Gamergirl.fr https://www.gamergirl.fr/la-sega-mega-drive-mini-a-sa-date-de-sortie/

Les éditeurs eux-mêmes ont également exploré cette voie avec succès, comme en témoignent les consoles miniatures officielles telles que la NES Mini, la SNES Mini, ou encore la Mega Drive Mini. Ces appareils permettent de revivre des expériences rétro dans un format moderne, même si leur catalogue reste souvent limité.

 

Cependant, ces solutions restent marginales face aux évolutions rapides du marché. L’avenir pourrait reposer sur un compromis :

  • Pourquoi ne pas envisager des consoles hybrides qui combineraient rétrocompatibilité et innovation technologique ?
  • Ou encore des éditions physiques contenant des clés de téléchargement permanentes, garantissant une certaine pérennité, même en cas d’évolution technologique ?

Ces initiatives pourraient répondre à la fois aux besoins des nostalgiques et aux attentes des nouvelles générations de joueurs. En attendant, la préservation du patrimoine vidéoludique reste un défi passionnant pour l’industrie.

Une réflexion nécessaire

Il est clair que l’industrie du jeu vidéo suit une direction dictée par les avancées technologiques et les modèles économiques modernes. Cependant, il nous revient, en tant que joueurs, de soutenir les initiatives qui préservent les valeurs du jeu physique et de démontrer qu’une demande existe pour des expériences tangibles et durables. Parmi nous, nombreux sont encore les collectionneurs ou les simples utilisateurs qui apprécient le confort de pouvoir revendre un jeu pour en acheter un autre, profitant ainsi d’un avantage à la fois économique et pratique.

Au final, le support physique n’est pas seulement un objet : c’est un morceau d’histoire, une part de la culture du jeu vidéo. C’est une expérience qui transcende le simple fait de jouer, permettant de transmettre à ses proches ou à ses descendants des souvenirs précieux. Pour certains, ces jeux ont changé leur vie, pour d’autres, ils ont offert des moments de passion ou simplement suscité des émotions uniques.

Le jeu vidéo est une véritable forme d’art. Tout comme nous admirons encore La Joconde aujourd’hui, nous aimerions pouvoir contempler et partager ces œuvres vidéoludiques à travers les générations. Préserver ce patrimoine est essentiel pour que, demain, ces chefs-d’œuvre continuent d’inspirer et d’émouvoir.

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